Député LFI- NFP

7eme circonscription du Rhône

Question écrite n°45 : Les armes « à létalité réduite » déshonorent la police et la République !

M. Abdelkader Lahmar alerte M. le ministre de l’intérieur sur l’usage disproportionné et inquiétant des armes dites « à létalité réduite » par les forces de l’ordre.

Depuis des années, de nombreuses ONG parmi lesquelles Amnesty international France, l’ACAT-France, le Syndicat des avocats de France, la Ligue des Droits de l’Homme et le Syndicat de la Magistrature mènent un travail d’analyse et de campagne pour demander l’interdiction de certaines armes à létalité réduite utilisées en maintien de l’ordre. L’usage de ces armes a également été critiquée par plusieurs instances internationales, dont le Comité des droits de l’homme de l’ONU (CDH) et le Comité contre la torture (CAT).

Les armes à létalité réduite ont été à l’origine introduites dans l’objectif de permettre « un usage différencié de la force » et en vue de limiter « le recours aux moyens propres à causer la mort ou des blessures ». Il s’agissait de « réduire l’intensité de la force employée et l’ampleur des dommages et des blessures ». En pratique, le type d’armes utilisé accroît le risque d’occasionner des blessures graves et ces armes sont venues renforcer l’arsenal des forces de l’ordre, sans pour autant réduire l’usage des armes à feu, puisqu’on constate au contraire un accroissement des morts par balle, lors d’interventions de police. L’ACAT-France soulignait déjà en 2017 que ces armes ont eu tendance à se substituer en réalité à des moyens de force d’intensité moindre.

Deux actualités brulantes montrent qu’il est urgent de rouvrir le débat sur l’usage des armes à létalité réduite et, plus généralement, sur les critères légitimant le recours à la force par les policiers et les gendarmes. Dans un décompte publié en octobre 2025, le média Basta ! révélait que le nombre de personnes décédées suite à une interaction avec les forces de l’ordre avait plus que doublé en 20 ans. « Dans les années 2000, entre dix et vingt morts par an, plus d’une vingtaine chaque année la décennie suivante. Et depuis 2020, le cap de la cinquantaine de décès annuel a été franchi… jusqu’à un funeste record de plus de 65 décès en 2024 ». Par ailleurs, Mercredi 5 novembre 2025, Libération et Médiapart ont publié des vidéos issues des caméras-piétons des forces de l’ordre mobilisées lors de la manifestation à Sainte-Soline en mars 2023. On y voit des gendarmes faisant un usage contraire à la doctrine d’emploi de plusieurs armes dites « à létalité réduite ». Ce jour-là, des manifestants ont été grièvement blessés.

Bref, dans le cadre du maintien de l’ordre comme dans celui de la police du quotidien, dans les manifestations comme dans les quartiers populaires les armes à létalité réduite blessent, mutilent et tuent. Les rapports, études et enquêtes des médias des ONG et des instances internationales vont tous dans le même sens : l’usage des armes à létalité réduite peut porter atteinte au droit de réunion pacifique, à la liberté d’expression, au droit à la non-discrimination ainsi qu’au droit à la vie, à la sécurité de la personne et à une vie libre de torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Pour toutes ces raisons, il est absolument vital de revoir immédiatement la doctrine d’emploi de ces armes. Tout doit être révisé, de la cave au grenier ! La police de la République ne peut être qu’au service des citoyennes et des citoyens. Dès lors que la police est employée autrement, elle devient une milice au service de quelque uns. Elle se déshonore et déshonore la République elle-même. Tout usage disproportionné de la force est à bannir. Le ministre peut-il donc préciser quelles mesures en ce sens compte-t-il prendre dans les semaines et mois à venir ?